Lettre d'information N°3 - Convention des Nations Unies sur les Accords de Règlement internationaux issus de la Médiation
Une convention des pays émergents ?
Mais où la France occupe une position particulière
- Bénin
- Congo
- République Démocratique du Congo
- Gabon
- Guinée-Bissau
- Honduras
- Macédoine du Nord
- Malaisie (pour mémoire)
- Tchad
- Burkina Faso
- Cameroun
- Guinée
- Mali
- Niger
- République Centrafricaine
- Sénégal
- Togo
Les atouts de la médiation commerciale
Les avantages "traditionnels" de la médiation
On connaît les avantages les plus fréquemment avancés de la médiation : rapidité, souplesse, moindre coût que l’arbitrage et, pourraient dire certains, moindre risque d’être lié par une décision insusceptible d’appel qui pourrait être de qualité jugée insuffisante par une partie, voire les deux quoique irréprochable formellement au regard des critères de la Convention de New York.
A quoi il faut ajouter un argument extra-juridique: une chance plus élevée de pouvoir préserver la continuité des relations commerciales entre les parties.
Un avantage annexe : la flexibilité et...
Un élément de comparaison plus neutre qu’il n’y parait : la confidentialité
- Interdit à une partie, au “conciliateur” (ce qui inclut le médiateur dans la phraséologie de la Loi type) et à toute personne “associée à l’administration de la procédure de conciliation” ou “autre tiers” (qui peuvent être des témoins ou experts) d’invoquer ou de présenter dans une procédure arbitrale ou judiciaire les informations (selon une liste précise) échangées ou émises durant la médiation;
- Prévoit que la divulgation ne peut être ordonnée par un tribunal arbitral, une juridiction étatique ou une autre autorité compétence, et que de telles informations, si présentées en contradiction de ce principe, sont irrecevables.
Les faiblesses de la médiation commerciale internationale
La médiation présente deux inconvénients bien connus en tant que mode de règlement définitif d’un différend.
Une faiblesse largement soulignée...
…est qu’elle ne peut aboutir sans accord des deux parties et qu’elle ne revêt pas de caractère contraignant. Les parties, en effet, ne sont pas dans l’obligation de se rallier à la recommandation du médiateur. Ce qui est très exactement l’effet miroir inverse de l’avantage/ désavantage de l’arbitrage, et à ce titre on peut considérer que les deux voies sont d’égale valeur, et que le choix entre les deux dépend de la préférence éclairée (si possible) des parties.
Dès lors qu’elles consentent à adopter la solution issue de la médiation, toutefois, et si un accord transactionnel valide est conclu, l’accord transactionnel issu de la médiation engage les parties.
Mais demeure l’obstacle...
…de l’exécution de la transaction, qui suit la règle de l’exécution des contrats. Ceci peut être sans grave inconvénient dans le cas d’une médiation domestique, mais il en va autrement lors d’une médiation internationale où les parties et surtout leurs actifs peuvent être situés dans une juridiction différente de celle du lieu de conclusion de la transaction.
En l’état actuel, la partie victime de l’inexécution d’une transaction dans un autre État n’a d’autre ressource que d’intenter une action en violation d’une obligation contractuelle, ce qui nécessite d’obtenir un jugement dans une autre juridiction que la sienne et de le faire exécuter.
C’est ce défaut dans le mécanisme de la médiation qui fait largement de l’arbitrage l’option par défaut dans la plupart des contrats internationaux.
Le défaut de finalité de la médiation
L’apport de la Convention de Singapour est décisif, et porte sur ces deux aspects
La Convention de Singapour permet :
- l’exécution des transactions issues d’une médiation internationales dans un autre État que celui où elles ont été conclues, selon les règles de procédure en vigueur dans l’Etat où l’exécution est demandée (article 3.1.); et
- la reconnaissance de l’accord transactionnel, permettant à une partie faisant l’objet d’une action judiciaire pour une cause déjà contenue dans un accord transactionnel de se reposer sur cet accord pour contester la demande (article 3.2.)
Le champ d’application de la Convention...
- doit être de nature commerciale (ce qui exclut le droit des personnes, de la consommation, des relations sociales …etc.), la “réserve de commercialité” de la Convention de New York faisant donc ici partie intégrante de la Convention sans constituer une option pour un Etat contractant.
- doit avoir fait l’objet de traces écrites susceptibles de servir de base (sinon de preuves au sens strict) à la médiation quelle que soit leur forme et pouvant consister notamment comme il est de plus fréquemment habituel dans les procédures alternatives de résolution des différends commerciaux, en des échanges (parfois abondants) de courriers électroniques.
- doit revêtir un caractère international, parce que les parties ont leurs siège ou établissement principal dans des juridictions différentes ou dans une juridiction différente de celle où intervient la médiation, ou de celle avec laquelle la médiation est le plus étroitement connectée.
La Convention et l’Asie
Une solution largement asiatique: le Arb-Med-Arb
Une formule combinant...
…médiation et arbitrage n’est pas sans attraits. En principe, elle devrait permettre de donner une chance à la résolution amiable à moindre frais, tout en laissant ouverte l’option de recourir à l’arbitrage en cas d’échec. Le seul écueil à éviter étant les clauses qui ne prévoient pas des éléments objectifs permettant de constater l’échec de la médiation, et ceci ne se limite pas à une limite de temps.
Sous cette condition, l’étape préliminaire ne devrait pas ajouter de façon significative aux coûts ni à la durée de la résolution du différend, la médiation étant supposée avoir éclairci les points de fait et de droit en dispute. Ce qui dépend toutefois de la qualité du médiateur et de la coopération des parties, et de l’appréciation de la valeur de la procédure de médiation par le tribunal arbitral.
Le bon fonctionnement requiert l’accomplissement de deux conditions : que les parties soient d’accord entre elles et avec le médiateur pour que les échanges intervenus dans le cadre de la médiation soient révélés au tribunal arbitrale, et la bonne volonté de celui-ci pour accueillir ces éléments de preuve dans sa procédure.
Une forme structurée...
La Chine...
…peut-être pour des raisons pratiques autant et plus encore que culturelles, est la plus avancée dans cette direction puisque la médiation est une étape préalable obligatoire en matière de contentieux judiciaire civil depuis la réforme de 2012 du Code de Procédure Civile, et plus près encore du sujet, devant les récemment créées Chambres Commerciales Internationales selon les Règles de Procédure de décembre 2018.
La clause-type suggérée par l'AIAC...
Le centre d’arbitrage...
Les limites de Arb-Med-Arb
Aussi attrayante qu’elle puisse sembler...
Dans la mesure où Arb-Med-Arb est un hybride...
…on peut s’interroger sur ses chances de prospérer à côté d’une forme qui ne l’est pas, celle de la médiation internationale exécutoire via la Convention de Singapour.
En revanche, de nouvelles formules...
…adoptées sous forme purement contractuelle pourraient logiquement s’imposer avec pour objectif de combiner les avantages des deux systèmes. Il s’agirait alors de clauses prévoyant deux stades clairement distincts (et non pas intégrés comme dans la clause Arb-Med-Arb typique), tout d’abord médiation et en cas d’échec de celle-ci recours à l’arbitrage, chaque procédure suivant ses propres règles. Ce qui permettrait de faire échapper la médiation, en tant que procédure autonome, aux accusations de procédure visant à bénéficier indûment des avantages en matière d’exécution de la Convention de New York. Les critères d’éligibilité au bénéfice de la Convention de Singapour et ses motifs de refus étant différents de ceux de la Convention de New York, quoique non dénués de similarité mais sans être identiques, la validité de chaque procédure s’en trouverait renforcée.
Conclusion
La Convention de Singapour vient apporter la touche finale à l’équilibre des trois modes de résolution des différends commerciaux internationaux, ce qui offre dès la négociation et la rédaction du contrat et de sa clause de résolution des différends un choix entre trois voies :
- les tribunaux, avec une exécution internationale des jugements au titre des Accords de La Haye ;
- l’arbitrage, avec une exécution internationale des sentences arbitrales au titre de la Convention de New York ;
- la médiation, avec une exécution internationale des accords de règlement au titre de la Convention de Singapour.
Aucune solution n’est par nature supérieure aux deux autres. Mais la médiation devenant une alternative crédible, ne peut plus être ignorée et présente sans nul doute un défi à la pratique consistant à faire de la clause d’arbitrage une option par défaut des contrats commerciaux internationaux, parfois et même souvent choisie dans l’ignorance de son mécanisme et de ses conséquences.
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Le contenu ci-dessus est à but purement informatif en rapport avec une sélection de l’évolution législative, réglementaire et jurisprudentielle dans la zone géographique concernée, qui ne peut être et ne prétend pas être exhaustive.
Il ne constitue pas un avis juridique en rapport avec un cas particulier et ne doit pas être considéré comme tel.Il peut nous être demandé une étude doctrinale plus approfondie en rapport avec l’un quelconque des thèmes évoqués.
Philippe Girard-Foley LL.M. (Penn) est membre du Law Institute de l’état de Victoria (Australie), avocat étranger accrédité auprès de la Cour Commerciale Internationale de Singapour, avocat conseil de la Chambre de Commerce Franco-Malaisienne et instructing solicitor devant les tribunaux malaisiens, membre du Chartered Institute of Arbitrators de Londres, branche de Kuala Lumpur, et seul avocat indépendant ayant un “correspondant organique” reconnu par l’Ordre des Avocats de Paris en Inde (New Delhi).